Colloque international « Chefferie coutumière traditionnelle et coutumière et cohésion sociale dans un contexte d’insécurité » 

Colloque international « Chefferie coutumière traditionnelle et coutumière et cohésion sociale dans un contexte d’insécurité » 

Le Laboratoire Langues, Discours et Pratiques Artistiques (LADIPA) de l’Université Joseph KI-ZERBO a organisé du 05 au 07 décembre 2022 un Colloque sur « Chefferie traditionnelle et coutumière et cohésion sociale dans un contexte d’insécurité. Chefs traditionnels et coutumiers, enseignants-chercheurs, chercheurs, étudiants, hommes de médias, …ont pris part à ce cadre de réflexion et de partage d’expériences qui a réuni des communicants de diverses spécialités allant des lettres, des sciences humaines, des sciences juridiques et politiques aux sciences naturelles. Organisé en mode hybride, les contributions à ce colloque sont venues de plusieurs pays dont la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin, le Niger, le Mali, le Sénégal, le Caméroun, la RDC et le Burkina. Ce colloque se tient dans un contexte où le sahel est particulièrement secoué par différentes crises dont la plus exacerbante est celle sécuritaire qui a contribué à « désorganiser nos modèles communautaires et a mis à rude épreuve notre légendaire tradition de vivre-ensemble », explique le Dr Moumouni ZOUNGRANA, président du Comité d’organisation. Trois jours durant, les participants ont porté la réflexion sur la place et le rôle des chefs traditionnels et coutumiers en tant que acteurs majeurs de nos sociétés, dont la gouvernance éprouvée de leurs communautés n’est plus à démontrer. « Nous avons choisi de mettre en réflexion, à travers des analyses croisées et pluridisciplinaires, le rôle que ces personnages séculaires et intemporels de nos sociétés peuvent jouer dans notre quête commune de la paix », soutient le Dr Moumouni ZOUNGRANA.

Selon le Directeur du LADIPA, le Pr Justin OUORO, la crise que traverse nos sociétés n’a rien d’une parenthèse. Elle est profonde, structurelle et consubstantielle aux formes de vie qui gouvernent notre existence. « En dessous et au fond des bruits, des tintamarres et des chants de fusils assourdissants de nos sociétés, il y’a une forte demande de sens et de transcendance », dixit le Pr Justin OURO à l’ouverture du Colloque.

Le Pr Bernard KABORE, Directeur de l’Unité de Formation et de Recherche en Lettres, Arts et Communication (UFR/LAC), les chefs traditionnels, garants de nos traditions doivent mettre en avant l’intérêt national et être des acteurs et des vecteurs de paix. Ils doivent se soustraire de l’instrumentalisation politique, ils doivent faire preuve de discernement nécessaire pour éviter les pièges de la désinformation, de l’intoxication et de la rumeur. « Dans le Burkina en crise et de crise, la chefferie traditionnelle, l’on pourrait qualifier de la plus ancienne institution de gouvernance endogène et qui compte de nos jours dans ses rangs des intellectuels de haut niveau et des compétences diverses, est appelé à gérer autrement en intégrant la diversité humaine et culturelle de notre pays et refléter le modèle de sagesse qu’on lui attribue ».

Du rapport synthèse des communications autour des axes stratégiques du Colloque :

Les communicants ont planché sur des thématiques pouvant être regroupées dans les axes ci-après :

-Axe 2 : La chefferie traditionnelle et/ou coutumière en temps de crise 

-Axe 3 : L’image de la chefferie traditionnelle et/ou coutumière dans les littératures et les arts 

-Axe 4 : La contribution de la chefferie traditionnelle/ou coutumière à la cohésion sociale 

-Axe 5 : Chefferie traditionnelle et/ou coutumière et développent local 

-Axe 6 : Chefferie traditionnelle et/ou coutumière et démocratie 

-Axe 7 : La notion du pouvoir dans les sociétés traditionnelles 

Dans la dynamique des axes sériés, les exposants ont interrogé les faits sociaux, les corpus juridiques, les textes de la littérature écrite, de la littérature orale et des œuvres d’art dans leurs capacités à prendre en compte les préoccupations sociétales. Plusieurs approches méthodologiques allant de l’anthropologie des textes oraux, de la sémiotique narrative, visuelle, pragmatique en passant par la poétique magique ont été convoquées dans les analyses dont les résultats peuvent s’articuler ainsi qu’il suit :

– les littératures et les arts contribuent à la formation cognitive et la promotion des valeurs de paix, de tolérance, de pardon ;

– la promotion de la parenté, des alliances à plaisanterie et des espaces de concertations communautaires à l’image de l’arbre à palabre sont gage de cohésion sociale ;

– la culture du sens de la solidarité, de l’entraide et de la justice sociale constitue un terreau fertile à l’éclosion de la cohésion sociale ;

– la chefferie traditionnelle et coutumière gagnerait à être institutionnalisée afin de lui donner toutes las aptitudes d’assumer pleinement ses missions.

Les réflexions ont porté également sur des thématiques variées liées aux questions linguistiques, aux manifestations traditionnelles et coutumières, aux mécanismes endogènes de prévention, de gestion et de résolution des crises, aux conflits fonciers dans la sous-région.

Par le truchement de la critique littéraire, de l’ethnolinguistique, du positivisme sociologique, de l’ethnolinguistique, de l’anthropologie et des recherches terrain, les communicants sont parvenus aux résultats qui suivent :

-les manifestations traditionnelles et coutumières sont des moments de ferveur où les textes oraux distillent des messages de paix, de cohésion sociale tout en fustigeant les comportements indélicats ;

-la justice transitionnelle qui s’appuie sur le triptyque vérité-justice-réconciliation est un mécanisme endogène qui permet de désamorcer les crises ;

-la chefferie traditionnelle et coutumière mérite d’être davantage impliquée dans la gestion des conflits et dans les instances de décisions ;

-la chefferie traditionnelle et coutumière devrait être dépolitisée ;

-les chefs traditionnels et coutumiers sont des auxiliaires de l’administration publique.

En somme, les échanges des deux jours ont permis de mettre en emphase la contribution que peut apporter l’institution traditionnelle et coutumière dans les moments de crise. Les chefs traditionnels et coutumiers peuvent mobiliser à la guerre, ils peuvent être des médiateurs, ils peuvent user de leurs pouvoirs religieux pour déjouer les stratagèmes de l’ennemi, ils sont le dernier recours en temps de paix tout comme en temps crise.